GUYANE : LE SECRETAIRE D'ETAT AU TOURISME MENACE LES AMERINDIENS DU SUD DE CE DEPARTEMENT D'OUTREMER.


 

Depuis 1970, le tiers sud de la Guyane (30 000 km2) est réservé à ses habitants autochtones: les amérindiens Wayampi et Téko (villages du fleuve Oyapock) et les amérindiens Wayana (villages des fleuves Maroni, Tampoc et Marouini) .Il est interdit aux touristes de s'y rendre. Cette mesure a été prise car des entreprises touristiques (Club-Méditerranée surtout) profitaient de la suppression, le 17 mars 1969, des 80 000 km2 du "Territoire de l'Inini" pour organiser des visites dans les villages Wayana. Depuis le décret du 6 juin 1930 instituant ce territoire, les populations traditionnelles de la forêt tropicale, tant noires issues du marronnage qu'amérindiennes, vivaient dans une relative tranquillité car elles échappaient, grâce à ce statut administratif spécial, aux velléités coloniales du Conseil Général siégeant à Cayenne.

Supprimer le Territoire de l'Inini, c'était livrer les peuples de la forêt amazonienne à la colonisation: la France venait-elle d'ouvrir le dernier chapitre (en forme de "solution finale"?) de l'invasion du continent des amérindiens tragiquement inauguré par Christophe Colomb? Vives polémiques dans la presse d'alors:

"COMBAT" du 4 mars 1970: <<Du génocide à l'ethnocide>>; "LE FIGARO" du 26 mars: <<Les derniers Indiens de Guyane>>;"LE FAIT PUBLIC" n° 16 de mars:<<La francisation des Indiens de Guyane>>; "LE CANARD ENCHAINE" du 26 aôut:<<Un zoo humain>> et sur toute une page du "MONDE" du 3 septembre:<<Les Indiens de Guyane française peuvent-ils être exploités comme curiosité touristique?>>.

Utile campagne de presse: le gouvernement incite le préfet de Guyane à corriger les effets désastreux de la suppression du statut de l'Inini. Certes, il ne redonnera pas 80 000km2 aux populations tribales, mais par arrêté préfectoral du 14 septembre 1970 il restituera 30 000km2 aux amérindiens qui sont les habitants exclusifs de ce tiers sud, avec les justifications suivantes dont il faut aujourd'hui mesurer toute la valeur car ce sont ces arguments qui sont jugés maintenant inutiles par l'actuel Secrétaire d'Etat au Tourisme Léon BERTRAND:

<<-Considérant qu'il convient de respecter le mode de vie, les coutumes, l'organisation sociale et familiale, ainsi que le particularisme des populations indiennes;
-Considérant d'autre part qu'il convient de préserver l'état sanitaire de ces populations;

-Considérant enfin que le libre accès des personnes en pays indien peut conduire ces dernières à méconnaître ou à négliger les risques qu'elles peuvent y encourir,
Sur proposition du Directeur de Cabinet, le Préfet arrête:
[...]>>

Suit l'arrêté en 6 articles soumettant à autorisation préfectorale préalable, après étude du dossier, l'accès au "pays indien", autorisation qui n'est jamais donnée aux touristes. Seules les personnes munies d'un ordre de mission attestant qu'elles doivent se rendre dans le sud de la Guyane pour des raisons professionnelles peuvent obtenir l'autorisation requise.

Le député-maire de Saint Laurent du Maroni Léon BERTRAND voudrait profiter de son titre dans l'actuel gouvernement pour faire abroger cet arrêté préfectoral. Il estime scandaleux que <<l'arrière-pays>>[sic]échappe à l'appétit des opérateurs touristiques. Pour lui, cela <<ferme au tourisme plus de la moitié [sic] de la Guyane>> (France-Guyane du 18/10/02). Il pense que l'<<écotourisme durable [magie du vocabulaire tarte à la crème!] ne bouleverserait pas le mode de vie des communautés autochtones>>. Plutôt que de se renseigner au sujet de ce redoutable outil au service de l'ethnocide qu'est l'ethno-tourisme, il s'est violemment opposé à l'ethnologue Pierre Grenand, provocant la démission du seul ethnologue membre de la Mission pour la création d'un parc national en Guyane. Abroger l'arrêté préfectoral de 1970, ce serait livrer les villages indiens au voyeurisme le plus malsain et jeter aux orties les arguments du préfet d'alors qui considérait pourtant de façon judicieuse qu'il convenait de <<respecter le mode de vie [...]des populations indiennes>>. Sans compter que les précautions sanitaires sont plus que jamais nécessaires et que l'aggravation du choc culturel ne ferait qu'accroître l'actuelle épidémie de suicides pour les mêmes raisons qui viennent d'être révélées par l'expertise demandée par la Mutualité française en Bretagne.

Les amérindiens eux-mêmes ont de multiples fois exprimé leur opposition à l'invasion touristique. Pourtant la chargée de mission au service "environnement" du Conseil Général Evelyne Sagne a déjà l'intention d'étudier les possibilités de mise en place dans le village indien de Camopi d'un <<centre d'hébergement touristique>> adossé à la création d'une ligne aérienne régulière entre ce village et Cayenne. Comme si l'arrêté préfectoral de 1970 était déjà supprimé. Il convient donc de susciter dès maintenant un large débat autour de la politique coloniale française à l'encontre des amérindiens de Guyane. Si, comme en 1970, de nombreux organes de presse révèlent ce qui se passe en Guyane, nous pourrons obtenir l'annulation des projets gouvernementaux actuels qui mènent au génocide culturel. Ou même au génocide physique, avec ce mercure que les chercheurs d'or illégaux continuent à déverser en toute impunité [Figaro-13/01/02] du côté des villages Wayampi (rivière Sikini et Alikéné) et des villages Teko et Wayana (rivières Waki et Tampoc). Mais que fait donc le préfet de Guyane Ange Mancini, lui qui n'avait pas peur des malfaiteurs lorsqu'il dirigeait le Raid ! Pourquoi les opérations coup-de-poing anti chercheurs d'or dites "anaconda", n'ont jamais lieu dans ce tiers sud appelé depuis 1970 "pays indien"? Thierry Sallantin < tsallantin@hotmail.com>

Pour en savoir plus : <www.solidarite-guyane.org> et Brigitte Wyngaarde, chef coutumière des Amérindiens Lokono, présidente de "villages de Guyane" : <aruacay@nplus.gf>