Nouvelle vague d’arrestations et de perquisitions dans des foyers mapuche en Wallmapu et dans les quartiers populaires de Santiago

Ces dernières semaines ont été animées par les arrestations de plusieurs militants mapuche auxquels on menace d’appliquer la loi antiterroriste pinochetiste pour des incendies de propriété et de camions qu’ils auraient commis dans le sud du pays, en territoire mapuche (Wallmapu). Selon la police, des perquisitions, notamment chez une modeste famille mapuche de Santiago, auraient eu comme résultat la découverte d’armes de guerre, ce que réfutent les propriétaires de l’habitation accusant la police d’un montage. Au Chili, héritage de la dictature, de telles pratiques restent communes ; à plusieurs occasions, et pas seulement dans le cas de procès contre des Mapuche, il a été prouvé que la police procédait de manière illégale, manipulant, mettant sur écoute les avocats de la défense ou inventant des preuves afin de maintenir des suspects en prison préventive le plus longtemps possible pour les faire parler.
Ce n’est pas un hasard si des avocats spécialisés dans les Droits de l’Homme, voire l’ex-juge Juan Guzman, connu pour avoir été l’un des premiers à oser ouvrir une enquête sur Pinochet au Chili, ont dû prendre la défense des personnes victimes de ces montages policiers.

Les procès qui ont lieu en ce moment, à Angol et à Cañete, ainsi que ceux qui s’ouvriront dans les prochains mois, témoignent de la volonté de l’Etat chilien de régler par la répression les conflits politiques et territoriaux dans le sud du pays, quitte à avoir recours à une loi antiterroriste mise en place sous Pinochet pour emprisonner les dissidents à la dictature aujourd’hui au pouvoir. Rappelons que l’actuelle Présidente de la République, Michèle Bachelet, a elle-même condamné, lors de sa campagne électorale, l’application de cette loi contre des Mapuche, tout en promettant qu’elle ne l’appliquera pas durant son mandat… 
La conclusion de procès récents, tel que celui du chef traditionnel, le lonko Avelino Meñaco, laisse pourtant une pointe d’optimisme, le tribunal de Cañete ordonnant en seconde instance son acquittement face au manque de preuve. Une telle victoire juridique a pourtant un coût, non seulement économique, mais également social et culturel, pour toute une communauté qui s’est vue privée de son chef traditionnel durant plusieurs mois d’emprisonnement. Souvent la répression lorsqu’elle touche une personne, touche également une famille et une communauté, c’est bien le sens que certaines autorités politiques chiliennes, et ses chiens de garde, semblent vouloir donner à ceux qui osent lever la voix pour récupérer leurs territoires et leurs droits dans une société où les inégalités sont non seulement sociales mais encore ethniques et territoriales.

Saluons donc les décisions des tribunaux qui établissent, bien que tardivement, l’innocence de certains prisonniers politiques mapuche, tout en espérant qu’un jour ces mêmes tribunaux et la société chilienne toute entière reconnaissent leurs revendications et rendent une véritable justice au peuple Mapuche. Les lois édictées par Pinochet et par ses successeurs au « retour à la démocratie » ne favorisent pas une telle issue mais les signes de soutien de plus en plus fort de la société civile chilienne montrent que celle-ci n’est pas dupe des montages policiers et des politiques de la « carotte et du bâton » perdurant depuis plus d’un siècle avec le Peuple Mapuche. Ces procès, tels que celui de la documentariste Elena Varela qui débutera au mois de mars, sont autant d’occasion de montrer, à travers la mobilisation de tout à chacun, la volonté et la capacité, malgré l’ordre établi, de transformer la société chilienne pour qu’une véritable démocratie basée sur la justice sociale et la diversité puisse y voir le jour.

RISPM, février 2009.